Savoir diriger son client vers une autre ressource

psychothérapie Mar 25, 2020

Il m’est déjà arrivé de dire à un client qui me consultait, depuis quelques semaines, quelque chose comme suit: «Je n’ai pas l’impression que je vais pouvoir vous aider davantage pour l'instant. Pour cette raison, je vous recommanderais une autre approche qui, selon moi, pourrait vous aider. Elle s’appelle []. Il y a des professionnels dans la région qui l’utilisent [].» 

 

J’avais aidé mon client à faire un bon bout de chemin. Le moment était venu de passer le flambeau à quelqu’un d'autre qui l’aiderait à se rendre à destination (objectif de thérapie), ou du moins à s'en approcher.

Je crois qu’on a le devoir de diriger un client ou une cliente vers d’autres personnes ou entreprises si on estime qu’il ou elle ne tire plus bénéfices de nos services.

Pas seulement parce qu’un code de déontologie nous y oblige.

Mais surtout parce qu’on a vraiment à cœur l’intérêt de notre client ou de notre cliente.

Ça vous est déjà arrivé de diriger une personne cliente vers une autre ressource?

 

Réponses de professionnels de la santé 

J’ai partagé ce texte en février 2020 sur le réseau social LinkedIn. Plusieurs professionnels de la santé, de divers horizons, ont laissé un commentaire. En voici quelques-uns fort intéressants.

«Oui bien sûr ! Le professionnalisme de connaître ses limites, la maturité de reconnaître l'expertise de l'autre et la bienveillance d'accompagner son client dans la transition.» – Francis Grégoire, conseiller d’orientation

« Idem ça m'est arrivé. C'est très frustrant, mais il faut savoir le faire quand on a l'impression qu'on ne peut plus rien apporter de plus. » - Bastien Noisette, psychologue et neuropsychologue

«Je ne pourrais être plus d'accord avec vos propos. Reconnaitre nos limites demande beaucoup d'humilité. Et je crois que cette humilité n'est malheureusement pas toujours au rendez-vous. Pour ma part, il était parfois difficile de reconnaitre mes limites dans des situations qui me reflétaient par exemple certaines de mes faiblesses. Comme quoi cette humilité n'est pas toujours pleinement acquise. Je vous laisse un article de blogue que j'ai déjà écrit à ce sujet si jamais vous avez envie d'un peu de lecture!  https://www.braver.net/fr/blog/limites-professionnelles» - Marie-Lou Gagnon, physiothérapeute et cofondatrice de Braver

«Oh oui !!!! Ça m’arrive quelques fois par année... Je constate toutefois que cela surprend le client habituellement, mais il me remercie de mon honnêteté. Malheureusement encore trop d’intervenants s’acharnent et voient les clients 40-60-80 fois avant d’admettre leurs limites. » - Danielle Boivin, ergothérapeute

«Je suis heureuse de ce partage, qui n'est pas un sujet assez courant à mon goût, pour plusieurs raisons que vous connaissez sans doute. Personnellement, il m'est arrivé de rediriger un client dès la deuxième rencontre pour une toute autre raison: J'avais l'impression d'avoir un miroir devant moi, une "Mélanie 20 ans plus tôt" !! C'était dû entre autres, à une problématique personnelle vécue à cette époque et qui faisait encore aujourd'hui partie des limites que je me devais de respecter en tant que personne, mais également en tant que professionnelle. Donc, je crois qu'il ne faut surtout pas hésiter lorsqu'on a le sentiment que "quelque chose cloche" et/ou que nous ne sommes peut-être pas la personne susceptible de venir en aide à un "client X". Merci d'avoir ouvert sur le sujet, sujet que je trouve d'autant plus pertinent, car souvent "oublié", pour ne pas dire "censuré" dans nos discussions cliniques.» - Mélanie Flamand, travailleuse sociale et psychothérapeute

« Oui à quelques reprises même. Car, effectivement, nous ne pouvons pas tous porter notre clientèle à bon port. Puisque nous avons nous-même nos propres limites de connaissances et d'expérience (...).

Si vous me permettez, il y a un autre point également qu'il est aussi important et impératif dans notre profession... l'humilité de se reconnaître en tant qu'humain avec nos forces.... et limites.

J'entends quelques fois, heureusement pas souvent, des thérapeutes dire que le client ou cliente ne s'engage pas ou s'est désengagé suite à une absence ou stagnation de cheminement.

À ce propos ou ligne de pensée, moi je me pose plutôt cette question. Comment pourrais-je me prendre autrement pour qu'il ou qu’elle puisse adhérer à sa propre thérapie ? » - Rémi Desgagné, travailleur social

 

Merci à ces professionnels qui m’ont autorisé à partager leur commentaire!

 

En conclusion 

En résumé, être professionnel, c’est avoir la capacité de reconnaitre ses limites et de penser au meilleur intérêt du client. Cela peut impliquer de passer le flambeau à un autre intervenant. Plusieurs professionnels de la santé adhèrent à cette perspective. Cela me réjouit. Et vous?

 

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